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8 juin 2016 3 08 /06 /juin /2016 16:48

Il n'y a pas qu'aux Bleuets que la liberté du choix d'accoucher est remise en cause!

Le Conseil de l'Ordre, le "Corps Médical" se chargent d'imposer leurs diktats aux femmes, aux couples...

La discussion qui a eu lieu après la projection du film "Entre leurs mains" a bien montré combien il était essentiel de s'écouter, d'échanger les points de vue, d'expliquer, de comprendre...La discussion s'est longtemps prolongée dehors quand nous avons dû rendre la salle et la demande apparaissait de la nécessité d'avoir d'autres occasions comme celle-ci

Un nouvel article de "Marie Accouche là" met une nouvelle fois le doigt sur les dysfonctionnements les préjugés du "pouvoir"

Marie accouche là

Ordre des sages-femmes : le règne du catastrophisme, de l’ignorance et du sexisme

Posted: 07 Jun 2016 03:16 AM PDT

J’ai longtemps cru que la médecine était une discipline scientifique. Vu l’importance des sciences et des mathématiques dans les études des futurs médecins, j’ai pensé que les praticiens maitrisaient la démarche scientifique consistant à observer les faits et les éléments, émettre des hypothèses, faire appel à un raisonnement rigoureux, s’appuyer sur des résultats validés, pour conclure par un diagnostic étayé débouchant sur une proposition de traitement rationnel.

Lorsque j’ai commencé à m’intéresser à l’accouchement, j’ai pensé que les mauvais traitements infligés aux parturientes étaient dus à manque d’empathie, de psychologie et d’intelligence émotionnelle chez des scientifiques au cerveau gauche hypertrophié. Mais plus je suis au contact de ces praticiens, plus je dois me rendre à l’évidence : ils ne sont pas des scientifiques. Pour eux, accompagner un accouchement consiste avant tout à appliquer des rituels visant à écarter les mauvais sorts, dans une ambiance de peur, de catastrophisme et d’ignorance.

Le dernier exemple de ce phénomène est la sortie dans la presse de Valérie Denais, Présidente de l’Ordre départemental des Sages-femmes d’Indre-et-Loire, réagissant à un accouchement qui s’est parfaitement déroulé au domicile d’une consœur, et dont l’interview se trouve ici : « L’accouchement doit rester un moment intime » (les plus perspicaces d’entre vous noteront que le titre n’a rien à voir avec le contenu de l’article).

Sans grande surprise, la Présidente de l’Ordre ne cautionne pas les accouchements à domicile. Comme seule argumentation pour étayer sa position, elle dit :

« Attention, danger ! Même dans le cas de grossesses normales, on n’est jamais à l’abri d’avoir à pratiquer une césarienne en urgence pour éviter un risque d’asphyxie du nourrisson ou d’une hémorragie de la délivrance, totalement imprévisible.
Dans certains pays voisins, notamment au Pays-Bas, l’accouchement à domicile est possible mais il est très encadré et soutenu par un dispositif incluant des équipes d’intervention rapide en cas de problème. »

Je ne reviens pas sur le mythe de l’ambulance qui attendrait devant chaque maison néerlandaise où une naissance aurait lieu, mythe largement véhiculé en France, mais faux. Je suis surtout interpellée par le ton catastrophique de l’argumentation et par les termes « totalement imprévisible ». Pour cette professionnelle de la naissance, l’accouchement est un moment où un mystérieux mal peut s’abattre sur la future mère ou son enfant, frappant aveuglément tel un démon surgissant de l’enfer, et dont les seules chances de salut consistent à s’abriter dans un sanctuaire, un temple ou, à défaut, un hôpital.

Dans un billet précédent « le mythe de l’accouchement qui dérape en quelques secondes », j’ai longuement expliqué la différence de prise en charge entre un accouchement à l’hôpital et à domicile, et notamment la présence continue d’une sage-femme capable d’identifier à un stade précoce toute complication lorsque la naissance se passe à la maison. La seconde différence majeure entre ces deux types d’accouchement est précisément la démarche scientifique dont font preuve les sages-femmes qui accompagnent les accouchements en dehors d’un hôpital.

En effet, réagissant à la même interview, la sage-femme blogueuse Dix Lunes dénonçait dans son billet « Consternation » l’attitude de praticiens consistant à appuyer leur point de vue sur un sempiternel « et si… » ouvrant la porte à toutes les peurs irrationnelles, alors que la démarche scientifique impose une évaluation. Cette évaluation doit non seulement s’appuyer sur une comparaison sérieuse des résultats des naissances à domicile et à l’hôpital, mais relève également d’une démarche scientifique à appliquer au cas par cas.

Contrairement à ce que croit la Présidente de l’Ordre, les césariennes, l’asphyxie du bébé et l’hémorragie de la délivrance ne sont pas « totalement imprévisibles », mais constituent des risques bien réels, qu’il faut anticiper, et qui exigent la mise en place de procédures rationnelles pour y faire face. C’est la raison pour laquelle les sages-femmes accompagnant les accouchements à domicile font un suivi de la grossesse lors permettant une connaissance intime de la future mère, maitrisent les gestes à poser au moindre signe de complication, disposent d’un matériel de premiers secours permettant de faire face à bon nombre de situations d’urgence (bouteilles d’oxygène pour réanimer un bébé, doses d’ocytocine injectable en cas d’hémorragie,…) et ont élaboré avec la future maman et le couple un plan affiné en cas de transfert vers l’hôpital. Cette évaluation des risques et la mise en place des réponses à ceux-ci illustrent une démarche basée sur la Raison, bien plus efficace pour accompagner les parturientes que les frayeurs irrationnelles et autres superstitions véhiculées par les praticiens hospitaliers.

Le sexisme pour contraindre les femmes

En plus du catastrophisme et de l’ignorance, la Présidence de l’Ordre professionnel fait preuve de sexisme dans sa conception de la place que les femmes doivent occuper lorsqu’elles accouchent. Elle dit :

« Cette demande d’un retour à des accouchements plus physiologiques, les professionnels l’ont entendue. Les recommandations de santé vont dans ce sens, en limitant les interventions qui ne sont pas nécessaires.
Et, désormais les maternités, même les plus imposantes comme celle de Bretonneau ou du Pôle Vinci, permettent aux femmes de préparer un projet de naissance personnalisé, pourquoi pas sans péridurale, en préservant une liberté de mouvement plus grande, en mettant à disposition des baignoires, des ballons, etc. »

Elle reconnait donc que des interventions médicales ne sont pas nécessaires. Plutôt que de les éliminer, elle prône leur limitation. Dans quel autre domaine médical impose-t-on à l’ensemble des patients, pourtant en pleine santé, des gestes médicaux inutiles ? Il n’y a que le corps des femmes qui est considéré, par essence, comme pathologique, et qui justifie des actes médicaux que les praticiens savent dépourvu de tout fondement.

Elle se réjouit ensuite que les maternités permettent aux femmes de préparer un projet de naissance personnalisé. Les femmes reçoivent donc une permission, accordée tel un prince magnanime aux êtres de basse condition et aux prisonniers. La Présidente se garde bien de donner la moindre garantie quant au respect de ce projet de naissance par l’équipe médicale. Célébrons néanmoins cette idée novatrice qui reconnait désormais aux femmes la capacité d’avoir un point de vue sur quelque chose qui les concerne directement.

Suivent les mots « pourquoi pas sans péridurale », comme s’il était incongru que des futures mères désirent vivre toute la puissance de l’événement. Bien qu’elle soit incompréhensible à leurs yeux, les praticiens, grâce à leur grandeur d’âme, octroient donc aux femmes cette excentricité.

La sage-femme insiste enfin sur la liberté de mouvement plus grande dont les futures mères devraient se contenter. Il est évident que les femmes ne peuvent pas obtenir une liberté totale de mouvement, êtres sauvages et dangereux qu’elles sont.

En une seule phrase, la Présidente de l’Ordre départemental des Sages-femmes assigne donc les femmes à une soumission complète au monde médical qui, lui seul, détermine les faibles marges de manœuvre qu’il est prêt à leur accorder.

Le Journal international de Médecine a également pointé les prises de position de Valérie Denais, nous citant, Dix Lunes et moi-même, comme référence dans l’article « Accouchement à domicile : controverses à demeure ». La journaliste semble de moins en moins dupe par rapport au catastrophisme et au sexisme du monde médical et suggère une certaine remise en question des pratiques autour de la naissance. Dans les commentaires ouverts exclusivement aux médecins, on retrouve malheureusement, pour seule argumentation, les peurs et les sempiternels « et si… ».

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